Vivre ensemble

Les sciences sociales ont retenu trois formules pour penser l'ordre social : le pouvoir, l'échange, la culture. Mais ces dispositifs intégrateurs semblent désormais en crise. Et les sciences sociales sont à la recherche de nouveaux modèles pour penser et re-fonder la vie en commun.

La relation de couple est en pleine mutation. Après le modèle romantique de l'amour fusionnel émergerait une nouvelle conception de la vie à deux : l'amour fissionnel, qui permet de conjuguer affirmation de soi et sentiment amoureux.

Qui ne connaît le trac avant de parler en public ou la ti-midité face à des inconnus ? Pour certains, parler aux autres, vivre avec eux est un enfer. Leur peur devient un réel obstacle à toute vie sentimentale, professionnelle ou amicale. On appelle cette pathologie l'anxiété sociale.

On ne s'adresse pas de la même façon à un ami, à un enfant, à un supérieur hiérarchique, à un conjoint, à un commerçant, etc. Les relations entre individus sont vécues comme des relations personnelles, liées à la personnalité de chacun, mais elles sont fortement marquées par la grammaire des statuts sociaux.

Inviter des amis, accueillir des étrangers sur son sol, recevoir ses parents... L'hospitalité apparaît comme un devoir ou une règle de civilité assez universelle. Elle suppose des règles de conduites et des obligations implicites tant de la part de l'invité que de celui qui reçoit.

Quelle que soit leur filière d'appartenance, les lycéens d'aujourd'hui sont solidaires dans leur attachement à des valeurs bien à eux : égalité de tous face à l'institution et respect des individualités, des goûts, des cultures de chacun... Des attitudes qui, par ailleurs, limitent les investissements dans le travail, la participation à la vie scolaire ou encore d'éventuels engagements plus politiques.

L'idée circule que la famille se désagrège, que ses liens se distendent. Les enquêtes montrent au contraire que les solidarités existent, faites d'échanges de services et de biens. Les grands-parents en sont de plus en plus le pivot.

Pendant longtemps, la vie en entreprise s'est ancrée dans une certaine stabilité et une culture commune. Au- jourd'hui, la précarité des emplois, l'éclatement des structures de l'entreprise, mais aussi le besoin de mobilité des individus rendent plus fragile la constitution de véritables collectifs de travail.

Contrairement à une image largement répandue, le jeune de banlieue n'est pas le prototype du jeune délinquant. Une grande majorité se tient à l'écart des bandes. Et au sein de ces dernières, les profils de conduites restent très divers.

L'identité américaine a trouvé sa source dans la tolérance religieuse, dans ses institutions et dans son rêve de liberté. L'Amérique et ses valeurs sont aujourd'hui fortement interrogées par les réactions xénophobes et les doctrines communautaires. Mais le melting-pot fonctionne toujours.

Mondialisation, construction européenne, multiculturalisme... autant de phénomènes qui bousculent la conception nationale de la citoyenneté héritée du modèle républicain. Pourtant, elle constitue encore le fondement du vivre ensemble au sein d'une communauté nationale. Moyennant, toutefois, le reconnaissance d'autres échelles de citoyenneté.

La Goutte-d'Or symbolise le brassage des populations propre à la vie parisienne, en même temps qu'elle en évoque certaines pathologies (délinquance, marginalité, violence...). Lieu d'accueil de multiples communautés ethniques, le quartier est aujourd'hui investi par la petite bourgeoisie intellectuelle. Une évolution qui pourrait bien changer la vie du quartier et son identité.

Si l'Islam a manifesté dès ses origines une certaine intolérance à l'égard des minorités religieuses, dans la pratique, les rapports ont été plus complexes et n'ont cessé d'évoluer selon les lieux et les époques.

La poursuite de l'intérêt personnel peut être utile au bien-être de la société. Telle est la thèse sous-tendue depuis le xviiie siècle. Mais depuis, d'autres traditions ont montré que l'économie pouvait aussi rimer avec réciprocité et contribuer ainsi au lien social.

La participation citoyenne, les relations informelles, comme les dîners familiaux ou les parties de bowling... sont en diminution depuis une trentaine d'années aux états-Unis. Pour le politologue américain Robert Putnam, ce déclin du capital social a des conséquences néfastes sur l'action collective et la démocratie.

Cent ans après la loi qui a reconnu leur existence, les associations affichent une belle vitalité. Répondent-elles aux carences du marché et de l'état, ou plus largement répondent-elles à des besoins de solidarité, de lien social ou d'expression politique ? Les analyses des sciences sociales donnent sur cette question des éclairages divers.

Les conflits entre groupes sociaux ont bien sûr des origines historiques, politiques, culturelles... Mais les psychologues sociaux ont montré qu'ils trouvaient aussi leur source dans la propension de chacun à classer le monde en groupes distincts et à juger « les autres » défavorablement.