La psychanalyste Isabelle Affolter raconte la création par ses soins d’un centre d’hébergement et de réinsertion sociale destiné aux femmes victimes de violences conjugales. Ce récit très vivant retrace l’évolution de l’institution, depuis l’époque héroïque du début des années 1980 où de tels sites étaient encore pionniers et où tout était à inventer avec les moyens du bord, jusqu’à l’ère des exigences gestionnaires inédites entraînant des tâches administratives accaparantes. Il y est question à la fois des relations avec les femmes, des affres et des obstacles minant le quotidien de la directrice, mais aussi, en filigrane, des transformations de la société française dans son ensemble : la désillusion de la gauche au pouvoir, l’émergence du sida, l’afflux de femmes franco-algériennes, puis de sans-papiers de tous horizons, avec des pouvoirs publics de plus en plus sourcilleux… Les portraits de femmes sont passionnants de complexité. Malgré tous les efforts de l’équipe d’intervention, certaines resteront enfermées dans une logique d’autodestruction dont la violence conjugale n’est que l’un des aspects, outre la toxicomanie par exemple. Dans des cas extrêmes, elles seront victimes de la vengeance de leur compagnon, égorgées, ou abattues au fusil de chasse.
Accueillir des femmes en détresse. Le quotidien d'un centre d'hébergement
Isabelle Affolter, Érès, 2008, 144 p., 10 €