Administrer la justice sans la déshumaniser

Aujourd’hui, le système judiciaire sature. Il doit se moderniser avec un double impératif : mieux respecter l’État de droit et optimiser les moyens.

La dernière grande réforme de l’administration de la justice date de 1958. Adossée à un découpage territorial et un traitement uniforme des procédures, elle posait les fondations d’une institution en complète déshérence. La loi de programmation 2018-2022 qui est en cours de promulgation au moment où j’écris ces lignes se situe dans un tout autre contexte : elle vise à répondre à la masse des litiges qui sont apparus ces dernières années en France comme dans toutes les démocraties occidentales. Devant ce défi, le législateur prend acte que l’acte de juger n’épuise plus le travail du magistrat. Il doit s’appuyer sur une administration fiable qui en constitue désormais le support indispensable. Nous sommes, en effet, face à une réalité : à une demande potentiellement infinie de justice, on ne peut répondre que par une offre nécessairement finie. Pour maîtriser ce flux, la réponse judiciaire ne doit plus intervenir en première ligne, mais comme un recours et selon des modalités plus rationnelles.

L’idée est de privilégier des modes de traitement différenciés des conflits qui répondent mieux aux aspirations des justiciables à être plus autonomes et à participer à la résolution de leurs conflits. On espère une justice plus rapide et performante, plus à même aussi de répondre à un niveau de qualité attendu par les usagers de ce service public. L’antagonisme entre l’indépendance du juge, la temporalité propre de son activité et les normes managériales n’est pas insurmontable. C’est ainsi qu’on voit apparaître les enquêtes de satisfaction des usagers dans beaucoup de pays européens. Cette démarche, parmi d’autres, consiste à se mettre à l’écoute du public et ainsi, à créer un lien de confiance entre les citoyens et leur justice. La participation active du public tend à devenir un mode de gouvernance des tribunaux.