L'Afrique est particulièrement touchée par la pandémie de sida. Mais pourquoi y a-t-il tant de réticences dans l'usage du préservatif alors qu'il représente une solution économique et fiable de protection contre les maladies sexuellement transmissibles ?
L'anthropologue Séverin-Cécile Abega, qui a effectué plusieurs enquêtes de terrain au Cameroun, explique qu'il ne semble apprécié ni des prostituées, ni des clients, ni des hommes et des femmes de l'ensemble de la population. L'argument de la diminution de la sensibilité, et donc du plaisir, se comprend facilement. Mais la sous-utilisation du condom s'explique principalement par des conceptions liées à la sexualité, à la valeur attribuée à l'acte lui-même, aux représentations du corps et de ses fluides. Le préservatif vient brouiller les catégories fondamentales de la pensée, il subvertit les représentations. Sa nature est fondamentalement ambiguë. Avec le préservatif, «l'interdit devient permis, et le licite illicite dans la mesure où il empêche les humeurs intimes des partenaires d'entrer en contact, l'acte de génération de devenir fécondant, mais autorise un malade à entrer dans un rapport dont il devrait être exclu. »