La modernité occidentale a vu parallèlement naître l’État moderne et l’essor de l’individu. L’État peut être vu comme une machine à opprimer les individus ou à l’inverse comme un « État de droit » qui garantit la vie en commun et les libertés individuelles.
Mais avant de penser la nature de l’État moderne, il fallait d’abord le désacraliser et comprendre les ressorts humains du pouvoir. Ce à quoi se sont employés deux grands penseurs du XVIe siècle : Machiavel et Étienne de la Boétie.
Machiavel était-il machiavélique ?
Penseur et homme politique florentin, Nicolas Machiavel (1469-1527), auteur du Prince (rédigé en 1513 mais publié en 1532), est souvent considéré comme le théoricien du cynisme politique. Le « machiavélisme », synonyme de duplicité, renvoie à l’image d’un pouvoir qui sait user d’un double jeu et de tous les moyens pour assurer sa propre survie.
En fait, Le Prince est d’abord un opuscule sur l’art de gouverner, adressé à Laurent de Médicis. C’est un traité sur l’art de conquérir le pouvoir et de s’y maintenir. On ne doit donc pas y chercher des préceptes sur ce que doit être un gouvernement idéal. Machiavel se veut d’abord un réaliste : « Comme mon intention est d’écrire pour ceux qui jugent sainement, je vais parler d’après ce qui est, et non d’après ce que le vulgaire imagine. On se figure souvent des républiques et d’autres gouvernements qui n’ont jamais existé. »