Brusquement, l’espace revient dans l’actualité. Près de quarante ans après l’abandon du programme Apollo, un petit groupe de milliardaires de la Silicon Valley (qui d’autre ?) envisagent de reprendre la route vers les étoiles. Elon Musk, patron de Tesla Motors et créateur des fusées SpaceX, raconte à qui veut l’entendre ses plans de colonisation de la planète Mars. Plus discrets, les gens de Planetary Resources (compagnie financée notamment par Larry Page et Eric Schmidt, deux des patrons de Google) cherchent à exploiter les ressources minières des astéroïdes. Une grosse compagnie japonaise, Obayashi Corporation, veut construire pour 2050 un ascenseur spatial, une structure gigantesque qui serait capable de transporter quotidiennement du matériel et des gens vers l’orbite terrestre…
De bonnes raisons de quitter le Terre
Pourquoi vouloir aller dans l’espace ? Pour des tas de raisons rationnelles : certains considèrent qu’éparpiller l’humanité dans l’univers est le meilleur moyen d’assurer sa pérennité. C’est l’opinion d’un Elon Musk, par exemple. Un autre argument met en avant les extraordinaires richesses qui peuvent être exploitées là-haut : il existe plus de métaux rares, comme le platine, sur certains astéroïdes que l’on en trouve sur la Terre. Une autre raison fondamentale a été présentée par le physicien Gerard O’Neill. En 1969, il avait fait plancher ses étudiants sur le sujet suivant : la surface d’une planète est-elle le lieu idéal pour une civilisation industrielle ? La réponse était évidemment non. Il est extrêmement difficile, voire impossible de maintenir la compatibilité entre un milieu hautement industriel et technologique et les fragiles équilibres écosystémiques. C’est encore plus vrai aujourd’hui avec l’irruption de la nanotechnologie et de la biologie synthétique. G. O’Neill en vint à élaborer le concept de cités spatiales, de gigantesques bases en haute orbite, pouvant abriter plusieurs dizaines de milliers de personnes. À cela se mêle une utopie politique : Timothy Leary, le fameux apôtre du LSD lors des années 1960, s’enthousiasme une décennie plus tard pour ces cités spatiales. Il y voit la possibilité de tester de nouvelles formes de sociétés et d’organisations. Plus encore, la vie dans l’espace permettrait à l’être humain de passer à un stade supérieur de son évolution, transhumain. Une mutation que le LSD et avant lui la multitude de pratiques yogiques, mystiques et psychédéliques des précédents millénaires n’avaient fait qu’anticiper, simuler.