C’est un projet très ambitieux que propose ce volumineux ouvrage codirigé par les économistes Amory Gethin, Clara Martinez-Toledano et Thomas Piketty : analyser l’influence des inégalités sur le vote politique dans les démocraties depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Un vaste projet qui, comme l’indiquent les auteurs, ne peut s’accomplir pleinement en 600 pages et est donc amené à être complété par des études ultérieures.
Les pays étudiés ont été sélectionnés à partir d’un critère essentiel : l’organisation régulière d’élections nationales mobilisant des candidats issus de différents partis politiques. Le résultat offre une belle diversité, allant des pays occidentaux (France, États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne) au Ghana et à l’Afrique du Sud, en passant par la Colombie, l’Inde, la Chine, Taïwan, ou encore le Japon et l’Australie. Les auteurs cherchent à comprendre comment les inégalités sociales influencent les choix électoraux. Dans ce but, ils accordent un poids particulier aux inégalités économiques (évaluées à partir du niveau de revenu et de diplôme), mais aussi à l’appartenance religieuse, ethnique, spatiale, régionale, de genre ou encore générationnelle. En effet, expliquent-ils, « le monde postcommuniste et postcolonial de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle met en jeu d’autres clivages et exige la construction d’autres plateformes de transformation sociale et économique permettant de rassembler des personnes issues d’origines diverses et métissées et de les convaincre que ce qui les réunit est plus important que ce qui les divise ».