« Quel effet cela fait d’être une chauve-souris ? » est le titre d’un très célèbre article de philosophie de l’esprit, écrit par Thomas Nagel en 1974. Ce texte, qui a fait couler beaucoup d’encre, était destiné à montrer que l’on ne pourrait jamais accéder au contenu de conscience des autres espèces. Les humains ne disposant pas du système d’écholocation qui permet aux chauves-souris de dépister leurs proies dans le noir, ils ne pourraient jamais connaître le contenu de la conscience de cette espèce. Conclusion : les états mentaux des animaux, si jamais ils existaient, nous étaient donc à jamais inaccessibles.
T. Nagel avait tort. Il se fondait sur l’hypothèse implicite que les humains sont incapables d’écholocation. Pourtant, depuis quelques années déjà, une technique pratiquée par des aveugles semble montrer le contraire. Certains d’entre eux parviennent en effet à repérer leur environnement par la méthode du « claquement de langue ». Ce claquement de langue contre le palais produit un « clic », dont l’écho parvient à leurs oreilles. Avec de l’entraînement, ils parviennent à savoir si un objet ou un obstacle – un poteau, une voiture, une chaise – est placé sur leur chemin. Désormais l’écholocation est bien pratiquée, et enseignée aux aveugles. Certains d’entre eux ont développé des compétences étonnantes. Des documentaires ont par exemple été réalisés sur le cas Ben Underwood, un jeune Américain qui pratique depuis l’âge de cinq ans et parvient à se déplacer avec une aisance assez étonnante. (voir une vidéo ici.)