Comment repenser nos déplacements ?

Tramway, métro, bus, vélo… Les habitants des centres-villes ont l’embarras du choix. Les autres n’ont souvent que la voiture comme solution. Comment y remédier ?

Le Parisien marche, plus que tout autre Français, et prend le métro ou le RER. À Copenhague, la bicyclette est sinon reine en tout cas omniprésente. Dans l’agglomération bordelaise (comme dans beaucoup de villes de province), on va chercher son pain en voiture, moyen de transport majoritaire, sauf dans le centre où le triptyque marche-vélo-tram gagne du terrain. La plupart des villes asiatiques bougent grâce aux deux-roues motorisés ; et une centaine de millions de vélos à assistance électrique circulent en Chine. Autant de pays ou de métropoles, autant de modèles… que les clichés cinématographiques dévoilent avec justesse, des automobilistes véloces de Los Angeles aux voyageurs fatigués des trains de banlieue de Tokyo. Nos façons de nous déplacer organisent le programme de nos occupations, notre rapport à l’espace, nos relations aux autres. Elles dessinent nos modes de vie.

Diversité entre les villes, diversité entre les citadins aussi : le cadre hypermobile et la « technicienne de surface » qui se croisent dans un aéroport ne partagent qu’incidemment le même espace-temps. Le capital économique et le capital culturel continuent à déterminer les niveaux de mobilité des individus, le nombre de déplacements qu’ils effectuent chaque jour, les distances qu’ils parcourent.

Paradoxalement, cette quotidienne banalité des pratiques de déplacement ne suscite pas les débats à la hauteur des enjeux liés à l’organisation de la mobilité : fonctionnements économiques (bassins d’emploi, relations entre entreprises, logistique, innovation en réseau…), impacts écologiques (consommation d’espace, énergies fossiles, changement climatique, pollutions), préoccupations sociales (accessibilité aux équipements et services, budgets des ménages consacrés au transport et au logement, intégration).

Penser une mobilité durable, aujourd’hui, nécessite une double rupture : accorder autant d’importance au mouvement qu’à la sédentarité, à l’instar d’Ildefons Cerdà (ingénieur-urbaniste, considéré comme l’inventeur du mot urbanisme au 19e siècle), en se préoccupant effectivement de mobilité urbaine et pas seulement de transport ; diversifier les leviers d’action, en ouvrant l’éventail des solutions, en mobilisant l’inventivité technique au profit de l’innovation organisationnelle.

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Un référentiel d’action publique obsolescent

Depuis le premier choc pétrolier de 1973, qui coïncide en France avec le développement des préoccupations environnementales, l’action publique nationale et locale s’est focalisée sur un objectif et un moyen : réduire le trafic automobile en ville par le développement des transports collectifs « lourds ». L’argumentaire paraît tenir la route : la voiture utilise trop de ressources rares, espace et énergie fossile ; et elle produit trop de nuisances, pollution atmosphérique et émissions de gaz à effet de serre. Dès lors, les métros ou tramways apparaissent seuls à même de concurrencer les performances automobiles, en apportant confort et vitesse.