CRITIQUE INTERNATIONALE

Le State building consiste à créer un Etat démocratique là où il n'y en a pas ou à rétablir des institutions étatiques là où il n'y en a plus. Vous y êtes : le State building, c'est ce qui se passe en ce moment en Irak. Mais aussi en Bosnie-Herzégovine, au Kosovo, bref partout où la « communauté internationale » ? ou parfois une coalition de pays ? est intervenue militairement, suite à l'effondrement de l'Etat (failed State) ou à une conduite jugée dangereuse (rogue State). Ce type d'intervention, propre à l'après-guerre froide, obéit à un objectif de « sécurité internationale » et vise à instaurer un « Etat responsable ».

Le dossier coordonné par Béatrice Pouligny, chercheuse au Centre d'études et de recherches internationales (Céri), présente sous un jour critique ce nouvel activisme des organisations internationales (Onu, FMI, Banque mondiale, Union européenne). Ces tentatives souffrent généralement d'une absence d'implantation locale, se limitant souvent à mettre sur pied des instances formelles, sorte d'Etats livrés clé en main, copiés sur les modèles en vogue de « bonne gouvernance ».

En Bosnie-Herzégovine, dont l'expérience est évoquée par Susan L. Woodward, la Constitution incorpore une série de conventions européennes et internationales, censées prévaloir sur la loi bosniaque... au point que nombre d'habitants pensent que le texte n'a jamais été traduit dans leur langue. Les autorités de tutelle modèlent la stratégie de développement, organisent la répartition du pouvoir entre les communautés, taxant les velléités d'autonomie de « résurgence nationaliste ». Le State building obéit à une logique de « légitimité internationale » des institutions mises en place, au mépris de leur « légitimité nationale ».

Autre travers, l'extrême rapidité du processus. Certains pays, écrivent B. Pouligny et Richard Caplan, connaissent ainsi « en quelques mois, l'"invasion" et le retrait aussi rapide d'organismes et d'aides en tous genres, sans aucun profit pour leurs populations ».

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