À Vienne, un manifeste paraît en 1929, intitulé La Conception scientifique du monde. Ce texte émane d’un petit groupe de savants qui ont décidé de partir en guerre contre l’esprit spéculatif et métaphysique, qui règne selon eux sur la pensée. Parmi les signataires du Manifeste, on trouve des philosophes – comme Moritz Schlick (1882-1936), l’animateur du groupe et Rudolf Carnap – mais aussi des logiciens Kurt Gödel, Otto Neurath, Hans Reichenbach, ou des physiciens.
Pour les membres du Cercle de Vienne, seule la science, fondée sur la démonstration rigoureuse et le recours aux faits d’observation, peut faire progresser la connaissance. Les connaissances scientifiques sont de deux ordres : il y a les propositions logico-mathématiques qui sont cohérentes en soi et ne sont pas liées à l’expérience. Puis il y a les propositions empiriques, fondées sur les faits, qui doivent donc être soumises au critère de vérification pour être établies comme vraies. Tout autre discours sur le monde est dénoncé comme « vide de sens », ou réduit à des « faux problèmes ».
Le Tractatus logico-philosophicus
Pour rédiger leur Manifeste, les membres du Cercle de Vienne se sont inspirés d’un essai publié quelques années plus tôt à Vienne : le Tractatus logico-philosophicus (1921). Son auteur, le jeune Ludwig Wittgenstein (1889-1951) est un personnage curieux. Né dans une riche famille de la bourgeoisie viennoise, il vit à l’écart du monde. Après des études d’ingénieur, qu’il a délaissées pour aller suivre les cours de B. Russell à Cambridge, il s’engagea, lors de la Première Guerre mondiale, dans l’armée autrichienne. C’est durant cette période qu’il a composé son Tractacus logico-philosophicus.