Défis contemporains de la parenté

Enric Porqueres i Gené (dir.), Ehess, 2009, 334 p., 17 €

Recompositions, adoptions, couples homosexuels, dons de gamètes, procréation assistée… Ni la famille, ni la reproduction ne sont plus ce qu’elles étaient. La parenté se renouvelle, les anthropologues aussi : l’innovation les intéresse parfois autant que les traditions. Ce volume examine, de manière comparative et à partir de cas singuliers, la manière dont les fondamentaux de la parenté sont mis en question par les pratiques reproductives modernes et reçoivent des réponses très changeantes de la part des autorités juridiques et morales, sinon de la part des utilisateurs eux-mêmes. Ainsi, l’Etat norvégien, afin de ne pas déconstruire la notion de maternité, a interdit le don d’ovocytes, et levé l’anonymat sur le don de sperme : dans les deux cas, les gamètes se voient accorder une reconnaissance qui fait de la biologie le seul aspect certain de la filiation. Ce cas, assez atypique, traduit bien l’alternative devant laquelle se trouvent les sociétés du « démariage ». L’institution nuptiale détrônée laisse la place à des revendications concurrentes : celle des gènes, celle des affects, celle des rôles assumés. Pourtant, bien des exemples traités dans ce volume montrent que la famille reste - à travers l’héritage et le soutien éducatif - encore une des institutions les plus solidement résistantes au temps. Les sociétés d’aujourd’hui se voient obligées de porter remède à l’écartèlement de la parenté en concevant des « parentalités multiples », des « pseudo fraternités » et des régimes adoptifs tantôt plus transparents, tantôt plus opaques. A chaque fois, il s’agit de donner une place (mais on ne veut pas toujours) aussi bien à ce qui est donné par la nature qu’à ce qui est construit par les acteurs. Ne croyons pas qu’il s’agisse d’une véritable nouveauté : la parenté a toujours été faite d’un tricotage assez arbitraire de nature et de culture. On saura gré aux auteurs de ce volume d’avoir su mettre à bonne distance un sujet qui, trop souvent, est prétexte à de simples opinions.