Les enquêtes quantitatives European Values Studies (EVS), réalisées environ tous les dix ans depuis 1981 auprès d’échantillons représentatifs de population, mesurent et comparent les valeurs les plus saillantes dans chaque pays. Elles permettent aussi d’analyser leurs évolutions sur le long cours. La dernière enquête, conduite en 2017-2018, livre au moins quatre grands constats concernant les valeurs des Français.
• Premièrement, le libéralisme des mœurs continue de progresser.
Les vagues antérieures montraient déjà une forte croissance, dans tous les domaines, des valeurs associées à l’individualisation. Chacun veut être autonome dans ses choix, décider de sa vie et non pas être dépendant des institutions ou de son entourage. Cette volonté de choisir ce qui fait sens pour soi s’exprime tout particulièrement dans le libéralisme des mœurs. On le mesure à travers le fait de trouver justifié ou injustifié le divorce, l’avortement, l’homosexualité, l’euthanasie, le suicide. L’indice qui en résulte a beaucoup augmenté en quarante ans : la moyenne de cet indice (allant de 1 à 10) est passée de 4,3 à 6,4.
Cette évolution n’est pas propre à la France. On la retrouve dans presque toute l’Europe de l’Ouest. Aujourd’hui, cette région connaît une libéralisation des mœurs à peu près équivalente à celle des pays scandinaves qui furent pionniers. Cette montée des valeurs d’individualisation est liée à l’élévation des niveaux de vie et à la sécularisation. En effet, le développement économique et la perte de prégnance des religions permettent plus facilement de gagner en autonomie vis-à-vis des cadres sociaux traditionnels et de construire un rapport positif à soi-même sans avoir à respecter les principes intangibles d’une morale, qu’elle soit religieuse ou laïque.