Dès la déclaration d’indépendance de l’État d’Israël par David Ben Gourion, le 14 mai 1948, ses voisins arabes, profitant du départ des dernières troupes d’occupation britanniques, se lancent à l’assaut d’Israël. L’Égypte, la Transjordanie, l’Irak, la Syrie et le Liban refusent en effet de reconnaître le plan de partage des Nations unies (29 novembre 1947) qui divise la Palestine mandataire en un État juif, un État arabe et une enclave internationale (les lieux saints à Jérusalem). Ils entendent faire prévaloir les droits de la population arabe installée sur place, rejeter la greffe d’une entité exogène à leur culture, mais aussi accroître leur propre sphère d’influence dans une région encore largement dominée par les Britanniques. Les responsables arabes reprochent au gouvernement britannique d’avoir promis la Palestine aux Juifs (déclaration Balfour du 2 novembre 1917), mais aussi à la dynastie hachémite qui a aidé Londres à chasser l’Empire ottoman de la région à la fin de la Première Guerre mondiale.
Succès de Tsahal
L’armée israélienne (Tsahal), créée dans la clandestinité sous le nom d’Haganah, cède initialement du terrain. Mais elle parvient à contenir la poussée arabe. Plusieurs facteurs expliquent la solidité de Tsahal. Elle bénéficie de fonds versés par les communautés juives américaines et de livraisons d’armes par les pays communistes – les dirigeants sionistes prônant alors une idéologie communautariste illustrée par les fameux kibboutz. Elle s’appuie également sur l’action de ses troupes de choc (le Palmah) et les raids de terreur perpétrés par des mouvements terroristes tels que l’Irgoun. Ces raids, combinés aux déclarations des dirigeants arabes appelant la population palestinienne à quitter Israël, le temps de laisser les armées arabes s’en emparer, constituent le point de départ de ce que les Palestiniens appellent la Nakba (la catastrophe). Israël ne laissera plus rentrer par la suite ces Palestiniens exilés qui vivent depuis dans des camps de réfugiés, principalement en Jordanie et au Liban.
Après vingt mois de combats intermittents et meurtriers qui font 5 700 morts du côté israélien et le double dans les rangs arabes, Israël s’empare d’une partie du territoire attribué aux Palestiniens par le plan de partage des Nations unies. Cette nouvelle ligne de cessez-le-feu, issue des armistices de 1949, devient la fameuse « Ligne verte » qui sert depuis de frontière entre Israël et ses voisins arabes. Pendant quelques années, le statu quo est respecté, d’autant plus facilement que les Occidentaux et les Soviétiques s’entendent pour ne pas exporter leur rivalité au Moyen-Orient. Seule la France aide massivement Israël pour tenter d’affaiblir le camp arabe qui soutient les indépendantistes algériens, et pour se faire pardonner son attitude à l’égard de la communauté juive lors du drame de la Shoah.
La guerre froide au Moyen-Orient
L’équilibre est rompu en 1956, lorsque Gamal Abdel Nasser décide de nationaliser le canal de Suez et de se tourner vers l’Union soviétique pour équiper son armée, les Occidentaux ayant refusé de financer la construction du barrage d’Assouan. Le président égyptien précipite par là même la région dans la guerre froide. Pendant trente-cinq ans, le Moyen-Orient devient une case majeure sur l’échiquier mondial, où Soviétiques et Occidentaux s’affrontent par alliés interposés.
Du 29 octobre au 7 novembre 1956, Israël s’entend avec la France et le Royaume-Uni pour lancer une offensive militaire concertée en direction du canal de Suez. Français et Britanniques espèrent récupérer le contrôle du canal et provoquer la chute de Nasser, tandis que les Israéliens cherchent à s’emparer de la péninsule du Sinaï, qui constitue pour eux un bouclier naturel face à l’armée égyptienne. L’offensive militaire tripartite atteint tous ses objectifs, mais Paris, Londres et Tel-Aviv sont contraints de se retirer quand l’URSS menace d’intervenir militairement. Les troupes israéliennes sont remplacées par des observateurs des Nations unies et la péninsule du Sinaï est démilitarisée. Les Israéliens n’ont pas tout perdu, puisqu’ils voient la menace égyptienne s’éloigner. Les États-Unis laissent faire, estimant que le moment n’est pas opportun pour un conflit majeur avec l’Union soviétique. Ils en profitent pour imposer leur influence dans la région, afin de contrer plus efficacement celle des Soviétiques qui, solidement installés en Égypte, prennent pied progressivement en Syrie, en Irak, au Yémen, en Algérie, puis en Libye.