Des maîtres et des dieux. Écoles et religions en Europe

Jean-Paul Willaime et Séverine Mathieu (dir.), Belin, 2005, 296 p.

Plus la pratique religieuse s'étiole, plus le souci de maintenir un enseignement des religions se manifeste en Europe. Mais sa mission et sa définition s'assortissent de conditions nouvelles telles que le respect du pluralisme, la liberté de conscience et la neutralité religieuse des Etats. Comment satisfaire à ces exigences ?

Pour tenter de répondre à cette question, Jean-Paul Willaime et ses collaborateurs ont mené une étude comparative sur les différents systèmes actuellement en vigueur dans les pays d'Europe de l'Ouest, plus quelques autres (Russie, Etats-Unis, Turquie). Elle fait apparaître une très grande diversité des pratiques eu égard à la présence et à la nature de ces enseignements. Certains pays (Grèce, Italie, Danemark), où la religion reste très identitaire et nationale, maintiennent un enseignement confessionnel, concédant peu d'effort au pluralisme. D'autres (Royaume-Uni, Allemagne, Suisse) ont évolué vers des enseignements non confessionnels aisément pluralistes, néanmoins obligatoires. Un troisième groupe est représenté par des pays marqués par l'existence de traditions concurrentes (libre-pensée en Belgique, socialisme en Russie, républicanisme laïc en Turquie) : différentes alternatives sont proposées (cours de morale laïque, étude purement historique des religions), mais l'enseignement confessionnel est également présent.

La France et les Etats-Unis offrent encore un profil différent : au nom de la neutralité laïque, l'Etat n'assure aucun enseignement religieux spécifique, si ce n'est à travers l'histoire générale, celle de l'art ou de la littérature. L'enseignement confessionnel est un hors temps scolaire, sur la base du volontariat, et le pluralisme est à la charge des communautés. Ce dernier modèle, on le voit, fait un peu exception dans un ensemble où l'enseignement des religions figure comme une composante indispensable de la formation du citoyen et passe pour une initiation au pluralisme. Une conception qui, en France, pourrait gagner des partisans.