Écologie/espace éducatif/Fake news

Écologie et charlatanisme

À propos de notre dossier « Réparer la planète » (n° 322, février 2020), Guillaume Blanc nous reproche d’avoir « mélangé science et charlatanisme » en faisant voisiner Nicolas Hulot avec Pierre Rabhi, la géoingénierie avec la biodynamie, ou encore en citant l’écoféminisme de Vandana Shiva.

Admettons que tout cela se discute, mais remarquons aussi que ces noms figuraient dans de brèves notices intitulées « La galaxie des pensées écologistes ». Or, si l’écologie est bien née sous le signe de l’observation scientifique, l’écologisme, en tant que projet politique, puise à bien d’autres sources que les sciences du globe et de la vie. Sciences Humaines a aussi pour vocation de faire connaître les courants d’idées et doctrines qui sont présentes dans l’espace public au nom de la santé de la planète, sans jeter d’anathème sur les unes ou les autres, mais en signalant leurs limites et les critiques qui leur sont adressées. C’est ce que fait par exemple le texte de Pauline Petit (« Nourrir le monde autrement », p. 43) en rappelant que les règles du « bio » ne le garantissent pas contre certaines contaminations, que la biodynamie est d’inspiration ésotérique et n’a peut-être pas d’impact notable sur les sols cultivés, ou encore que les potagers urbains, malgré leurs rendements élevés, ne sauraient nourrir à eux seuls une métropole de dix millions d’habitants. La part des faits probables et de ce qu’on voudrait vrai est difficile à faire lorsqu’il est question de définir la manière dont les hommes devraient vivre et agir. Même les évidences de l’observation peuvent être soumises à discussion. Lorsqu’en 1610 Galilée convoqua le grand-duc de Toscane pour lui montrer, à l’aide de son nouveau télescope, les satellites de Jupiter et les cratères de la Lune, certains savants lui objectèrent que ce qu’on y voyait n’existait peut-être que dans sa lunette, et non dans le ciel. En l’occurrence Galilée avait vu juste, l’avenir le prouva, mais il pouvait aussi avoir tort : toute sa vie, il refusa de reconnaître l’influence de la Lune sur le mouvement des marées, et cela parce que cette idée était celle des astrologues, qu’il considérait comme des charlatans… Il arrive que des théories qui se révèlent fausses comportent des thèses vraies. Et réciproquement.