Tablette, Smartphone dérobés aux plus grands, console de jeux, ordinateurs comme la bonne vieille télévision toujours très regardée, suscitent décidément beaucoup de défiance en cas de surexposition des plus jeunes. Les études sur leurs effets délétères se sont multipliées ces dernières années, et six médecins français ont aussi récemment consacré une thèse de médecine générale aux liens des écrans avec les troubles du langage primaires. D’abord publiées dans la revue Acta Paediatrica (1), leurs observations ont ravivé le débat dans l’espace public.
Les chercheurs sont partis des résultats de travaux scientifiques préalables montrant que les jeunes enfants exposés aux écrans connaissaient moins d’interactions émotionnelles avec leur entourage. Or, celles-ci sont indispensables au développement psychomoteur et du langage. Alors que 4 à 6% des enfants sont atteints de troubles primaires du langage en France, les auteurs ont cherché à savoir si l’on pouvait établir un lien statistique avec les écrans. Ils ont procédé par cas témoins, à partir de deux groupes de jeunes sujets entre 3,5 ans et 6,5 ans, les uns déjà suivis pour troubles du langage primaires (hors motifs de prématurité, de maladie congénitale, de troubles neurologiques, psychiatriques ou d’audition), les autres ne présentant pas de symptôme. L’interrogatoire des familles sur les activités et le contexte de la consultation des écrans a permis d’établir un lien au sein du premier groupe : « regarder un écran, quel qu’il soit, le matin avant d’aller à l’école, multiplierait par trois les risques de développer un trouble du langage, et par six, en plus de cela, quand l’enfant le fait seul », rapporte le Dr Manon Collet, l’une des contributrices de l’étude. Ce phénomène peut s’expliquer par la sur-stimulation du cerveau juste au réveil, et donc l’épuisement de la capacité d’attention, ce qui ruine toute disponibilité pour les apprentissages de la journée. Cet impact négatif est amplifié par l’absence d’échanges avec l’adulte sur les contenus numériques visionnés, qui auraient permis de mettre des mots sur les images, donc d’enrichir le lexique et de développer la capacité de formulation des idées comme des émotions.