
En histoire, tout reste à penser ou presque. Non qu’il faille abandonner ou récuser ce qui a été fait jusqu’ici mais nous savons bien que, au fil des conjonctures, les questions que nous nous posons et que nous posons au passé changent. Les dossiers se rouvrent, de nouvelles sources sont découvertes et de nouvelles réponses formulées. Un exemple de saison : les interrogations sur le changement climatique amènent à reprendre l’histoire des révolutions industrielles et de la marche du progrès. Quel va être l’avenir de cette nouvelle histoire qui s’est vite nommée Anthropocène ?
L’histoire globale est un autre chantier, bien établi et reconnu désormais. Convient-il de la considérer comme une nouvelle spécialité à l’intérieur de la discipline, une échelle à côté d’autres (locale, nationale, régionale), ou comme une approche englobante ? L’histoire qui convient à un monde globalisé et qui, d’une certaine manière, l’a toujours été plus ou moins. Après les histoires nationales, coloniales, impériales, postcoloniales, connectées, l’histoire s’écrira-t-elle d’un point de vue global ? Comme les histoires du 19e siècle (et au-delà) se sont écrites d’un point de vue national. Le monde numérique qui est désormais le nôtre a déjà et aura des incidences considérables sur le métier d’historien. L’automatisation et la massification de la collecte des données vont transformer ce que l’on entend par archives, sources, corpus. C’est l’un des enjeux de ce que l’on nomme de manière parfois vague les humanités numériques. Aux historiens d’aujourd’hui et de demain d’être présents sur ce terrain en mouvement.
François Hartog
Historien, directeur d’études à l’EHESS, il est l’un des membres fondateurs de l’Association des historiens. Il a publié, entre autres, Croire en l’histoire, Flammarion, 2013.