Ex-patients...et nouveaux psys

«Je me trouvais enfermée avec la seule chose que je possédais en abondance… le vide. » Voilà comment Arnhild Lauveng, psychologue norvégienne et ancienne schizophrène, explique les raisons de sa compulsion à manger tout ce qui lui passait sous la main : carton, papier-toilette… Dans son livre-témoignage, elle raconte la dizaine d’années où elle a lutté contre la maladie, y compris les séjours en hôpital psychiatrique… Jusqu’à sa guérison. C’est adolescente que la voix du « Capitaine » a commencé à la tourmenter. Multipliant les injonctions : dormir moins, travailler plus… et même se frapper elle-même. Auto-mutilations, hallucinations, et autres comportements a priori vides de sens pour l’observateur lambda, y sont ici décryptés par celle qui, comme elle le souhaitait, est devenue psychologue. « Il vaut bien mieux penser qu’une partie de ces automutilations était une tentative perturbée et insensée pour prendre le contrôle d’une situation incontrôlable et agir pour ceux que j’aimais, que de savoir seulement que ‘‘je le faisais parce que je suis schizophrène’’. Ça n’est pas très bon pour l’image que l’on a de soi. » Ainsi sur les loups qu’elle retrouvait régulièrement dans ses hallucinations : « Ils n’étaient que des sensations, des sensations humaines reconnaissables et compréhensibles, mais déguisées. C’était tout. » Il semblerait d’ailleurs que ce soit grâce à l’interprétation de ses symptômes qu’elle a pu, peu à peu, s’orienter vers la guérison. Tout l’intérêt de ce retour d’expérience, non seulement filtré par certaines connaissances en psychologie, mais ayant également le mérite de présenter la maladie de l’intérieur. Difficile de mieux mêler la (relative) objectivité du professionnel et la subjectivité du patient, une combinaison cruciale pour bien appréhender la maladie psychique… et critiquer l’institution psychiatrique.