Les cinq États arabes qui font l’objet de ce livre ont de nombreux traits communs : l’émergence de sociétés civiles, l’absence de solution politique dans le cadre des régimes en place, l’autoritarisme (Syrie) ou bien l’incapacité à former un gouvernement (Irak, Liban, Yémen, Libye). Autant de symptômes qui expliquent une faillite totale ou partielle. Le propos de Pierre-Jean Luizard est de montrer comment le confessionnalisme, la corruption, le système milicien, les ingérences étrangères, la fragmentation territoriale ont précipité ces pays dans le chaos. Mais il observe aussi que quatre des cinq pays sont des constructions coloniales, et que l’exemple de la Libye, où le confessionnalisme est absent, rappellent qu’il n’existe pas de détermination univoque. L’importation du concept d’État-nation par les colonisateurs s’est avérée lourde de conséquences puisqu’elle s’est faite au détriment de groupes minoritaires (chiites et kurdes en Irak, sunnites en Syrie après 1966). Au Liban, l’instrumentalisation des élites confessionnelles locales a permis de s’en faire des alliés, alors qu’au Yémen, les besoins de la lutte contre la domination coloniale ont conduit à l’adoption d’idéologies d’origine occidentales (nationalisme au nord, marxisme au sud), qui ont échoué. L’échec de l’État, de l’inclusion citoyenne, les humiliations et la mise au ban de pans entiers de la population ont été des carburants de révoltes qui ont souvent dégénéré en jihad.