Chapitre 3
L’examen diagnostique des difficultés d’apprentissage chez l’adolescent
COMPOSANTES ET DYNAMIQUE DE L’EXAMEN
La première fonction de l’examen est de rassembler des informations utiles et suffisantes pour comprendre la personne et pouvoir prendre les décisions les plus appropriées. Pour ce faire, le praticien dispose de diverses sources d’information : l’anamnèse avec les responsables éducatifs, l’entretien avec l’adolescent, les tests et questionnaires, l’observation en cours d’examen... Le praticien ne doit pas perdre de vue que ces sources d’information se complètent l’une l’autre et qu’aucune n’est suffisante prise isolément.
Les modalités d’un examen ne doivent pas être stéréotypées. Il n’y a, par exemple, pas lieu de faire passer à tous les patients une même batterie de tests, quelles que soient leurs plaintes. Au contraire, chaque examen doit être adapté au jeune à évaluer. Un examen se construit au cours des interactions avec le jeune. Il s’appuie sur une suite d’hypothèses de plus en plus précises et de plus en plus argumentées. Il ne se termine que lorsque le risque de prendre une décision erronée est suffisamment réduit. Ce risque n’est jamais nul, car le développement et l’itinéraire de vie d’un adolescent sont déterminés par un très grand nombre de variables dont le praticien ne saisit qu’une partie. Ce dernier doit donc trouver un équilibre entre la nécessité de récolter un maximum d’informations utiles et celle de ne pas prolonger indéfiniment l’examen. La décision finale est, par conséquent, toujours probabiliste. Il ne s’agit pas de jouer l’avenir d’un adolescent à pile ou face, mais d’avoir conscience qu’une marge d’erreur, la plus réduite possible, est toujours présente.
Les hypothèses que nous élaborons en cours d’examen devraient être réfutables. En d’autres termes, elles devraient pouvoir être mises à l’épreuve des faits. Il devrait être possible de décider si oui ou non, elles permettent d’expliquer certains phénomènes observés. Une hypothèse qui permet d’expliquer un phénomène et son contraire n’est pas réfutable et n’est guère utile dans un examen psychologique. (…)
Au moment de l’interprétation de l’ensemble de nos informations, nous ne pouvons considérer l’intelligence (et les autres aptitudes) comme à côté de la personnalité. Au contraire, tout résultat d’examen devrait être interprété au niveau de la personnalité. Nous concevons celle-ci comme l’organisation dynamique des aspects cognitifs, affectifs et physiques de l’individu. Ce n’est qu’au sein de cette organisation qu’un résultat particulier prend son véritable sens. C’est pour cette raison que deux notes identiques à un test ne peuvent pas avoir a priori la même signification. (…) L’attention portée aux caractéristiques internes du jeune et à leur intégration doit aller de pair avec la prise en compte de l’environnement matériel et humain dans lequel évolue ce jeune. La personnalité n’est pas une entité isolée. (…)
Le travail du praticien en cours d’examen s’apparente plus à celui du détective qu’à celui du botaniste. Le détective recueille des indices et des informations pour chercher à expliquer un événement. Au départ, il doit être ouvert à toutes les explications possibles. Progressivement, il va élaborer des hypothèses qu’il va mettre à l’épreuve des faits. Celles-ci seront alors réfutées ou corroborées. Il va ainsi petit à petit découvrir un sens aux faits, une relation cohérente entre toutes les informations rassemblées. Mais parfois aucun sens n’émerge, soit que le praticien manque d’informations, soit qu’il manque d’un cadre théorique qui lui permette d’établir des liens et d’avancer des explications. Il devra alors reconnaître les limites de sa compréhension. Le botaniste aborde la réalité d’une tout autre manière. Sa démarche est de classer. Dès le départ, il possède en effet des catégories porteuses de sens. Son effort va donc consister à rassembler un maximum d’informations pertinentes afin de pouvoir classer son objet d’étude dans une et une seule des catégories préalablement définies.