De quand date la prise en compte de la douleur chez l’enfant et le nourrisson ?
Cette question a émergé à la fin des années 1980, en particulier avec la parution en 1987 d’une revue de la littérature (1) aux Etats-Unis. Celle-ci montre que lorsqu’on anesthésie réellement, avec des antalgiques, des enfants nés prématurés lors d’une opération – en plus d’un curare qui, lui, immobilise sans soulager la douleur, – cela diminue nettement les complications, voire les décès des enfants. Ce genre d’étude ne serait éthiquement plus faisable aujourd’hui, mais elle a été le point de départ de l’attention portée à la douleur de l’enfant. En France, l’une des pionnières dans l’étude de la douleur a été le Dr Annie Gauvain-Piquard, de l’Institut Gustave Roussy, qui a mis en évidence la notion « d’atonie psychomotrice » : en effet, on associe en général la douleur aux cris, aux plaintes, à l’agitation, or, le fait qu’un enfant soit très calme – trop calme – peut, en fait, être le signe d’une douleur intense. Puis, toujours en France, le Dr Daniel Annequin et l’association Pediadol ont considérablement fait avancer les choses : en 1991, Pediadol a ainsi organisé une première journée pluridisciplinaire (2) regroupant médecins, infirmiers, psychologues, sur la douleur chez l’enfant. Un sujet balbutiant il y a vingt ans, car les moyens antalgiques disponibles (crème anesthésiante, MEOPA…) étaient rares. D’ailleurs, il est à noter que lors de la journée organisée en 1991, Pédiadol craignait de ne pas remplir une salle de 300 personnes. Or, 1400 personnes se sont présentées à l’évènement, preuve qu’il répondait réellement à un besoin. Car si les patients souffrent, il ne faut pas oublier que les soignants souffrent également de ne pas pouvoir traiter la douleur au mieux.
Votre association, Sparadrap, insiste beaucoup sur la question des droits des enfants à l’hôpital. Comment sensibiliser à cette question ?
Les droits de l’enfant constituent en effet la base du travail de notre association, qui a été inspirée en cela par Janusz Korczak. Ce pédiatre polonais, qui s’est occupé d’enfants dans le ghetto de Varsovie, est l’un des initiateurs de la Convention internationale des droits de l’enfant. Il estimait que l’on peut s’adresser directement à l’enfant, qu’il a ses propres besoins, différents de ceux de l’adulte, et que l’on peut surtout dialoguer avec lui sans passer systématiquement par les adultes. C’est pourquoi la question du droit de l’enfant à être informé sur les soins nous paraît primordiale. La Charte de l’hospitalisé, rédigée par des associations européennes en 1988, stipule ainsi, dans son article 4, que l’enfant a le droit d’être informé, avec des moyens adaptés à son âge et sa compréhension. Mais comment faire pour que cela soit effectif sur le terrain ? Pour notre association, les mots ne suffisent absolument pas pour informer un enfant sur ses soins. L’informer de manière adaptée passe donc par le jeu, par des illustrations, etc.