Frères et sœurs : l'inévitable rivalité ?

Dans l’idéal, c’est merveilleux d’avoir un frère ou une sœur. Dans la réalité, on peut souffrir de la comparaison, de son rang dans la fratrie, ou de ne pas être l’enfant préféré. Et on s’en veut de souffrir…

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Elle était la préférée. Quoi qu’elle fasse, mon père était émerveillé. J’ai passé toute mon enfance dans son ombre. »

« Mon frère se comportait comme un tyran. Les gens pensent que ce ne sont que des chamailleries entre gamins. Pourtant, des années après, la blessure reste vive ».

« Une fratrie de trois, c’est le pire scénario. Avec mon frère et ma sœur on n’a jamais trouvé l’équilibre, il y en avait toujours un qui souffrait, qui se sentait rejeté. »

Il suffit de discuter un peu avec les personnes qui nous entourent pour constater que les souffrances liées aux relations fraternelles sont bien plus fréquentes et profondes qu’on ne le croit. Des blessures largement sous-estimées, y compris par les psys, ces derniers ayant parfois tendance à se focaliser sur les liens « verticaux » parent-enfant (et le fameux complexe d’Œdipe), en négligeant ces relations « horizontales » pourtant déterminantes dans notre construction.

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Par ailleurs, en règle générale les relations fraternelles sont totalement idéalisées. On se doit d’aimer son frère ou sa sœur, comme si cela coulait de source. D’où la culpabilité et la honte ressenties par ceux qui nourrissent des affects « négatifs » envers leurs frères et sœurs… Pourtant la réaction la plus naturelle, la plus compréhensible, face à ce fauteur de trouble qui vient perturber notre tête-à-tête avec le couple parental, n’est-elle pas de se sentir en rivalité, voire dévoré par la jalousie ?

Instinctivement, nous cherchons tous à obtenir et à conserver la première place auprès de celle qui, la toute première, nous a nourris et donné de la tendresse : notre mère. Pour l’aîné, c’est comme si un petit frère ou une petite sœur qui apparaît le privait d’une part du gâteau. L’arrivée de cet autre peut être vécue comme une diminution de l’espace vital et remettre en cause son amabilité : si ses parents ont décidé d’avoir un autre enfant, se dit l’aîné, c’est peut-être que celui-ci n’était pas « suffisant »… d’où le sentiment de jalousie « classique » de l’aîné envers ses cadets. Sachant que, comme le montrent de nombreux témoignages, la position du jaloux comme celle du jalousé peuvent être tout aussi génératrices de souffrance.

Des souffrances multiples

Les souffrances liées à la fratrie sont multiples, complexes et résistent aux généralisations. Néanmoins, différents facteurs, comme le nombre de frères et sœurs, la position dans la fratrie et les écarts d’âge, peuvent plus ou moins favoriser l’apparition de certaines problématiques. La psychanalyste Virginie Megglé a rassemblé dans son ouvrage Frères, sœurs : guérir de ses blessures d’enfance de nombreux témoignages qui illustrent ces différents cas de figure. Concernant par exemple la position dans la fratrie, force est de constater qu’aucune n’est idéale. L’aîné pourra se lamenter non seulement d’avoir été trahi à l’arrivée du cadet, mais aussi de s’être vu attribuer la responsabilité de veiller sur les plus jeunes et de seconder ses parents, rôle qui peut l’isoler du reste de la fratrie.