Good bye Mao ?

Le Parti communiste chinois (PCC) a un problème : celui de sa survie. S’il est vrai qu’il est resté au pouvoir, contrairement à la plupart de ses homologues du temps de la guerre froide, c’est au prix d’une adaptation très pragmatique, jusqu’à effectuer certains virages idéologiques à 180°. Le vieux parti internationaliste et prolétarien s’est tourné, durant les années 90, vers le nationalisme et le capitalisme, nouveaux instruments de légitimité mieux adaptés à l’air du temps. Journaliste au Monde, ayant vécu plusieurs années en Chine, l’auteur analyse, à travers la narration de destins extraordinaires, de trajectoires chaotiques et d’anecdotes, la situation du pays depuis la mort du Grand Timonier. Parvenu au pouvoir grâce à l’alliance des intellectuels et des paysans, ayant bâti ensuite une classe ouvrière qui fut longtemps son fer de lance, le PCC a abandonné les paysans et les ouvriers à la fin de la guerre froide. Il a conclu un nouveau pacte social avec d’autres catégories émergentes : les classes moyennes faites d’employés du secteur public et d’entrepreneurs. Celles-ci ont, en retour, donné l’élan nécessaire au pays pour, non seulement rester dans la course au développement, mais aussi devenir une puissance émergente dans un monde globalisé.
Le PCC, lui, n’a pas cédé une once de pouvoir, grâce à une règle d’or : le parti conserve le monopole de la politique. Or ce monopole, selon l’auteur, est désormais menacé. Le pacte social conclu il y a quinze ans se fissure face à la dégradation de l’environnement et à l’accroissement des inégalités régionales et sociales. Le capitalisme d’Etat fait de millions de paysans et d’ouvriers des parias dans leur propre pays. « La Chine populaire est travaillée par un néomaoïsme qu’on aurait tort de réduire à un folklore inoffensif », prévient Frédéric Bobin. Et les voies de la réforme sont tout aussi périlleuses pour le PCC, qui a peur de lâcher une force qu’il ne maîtriserait plus. Alors, on se demande, en effet, si plutôt que de prendre définitivement congé de Mao, les Chinois ne diront pas un jour « Good bye » au PCC.