On demande souvent au témoin d'un acte criminel d'identifier un suspect parmi plusieurs personnes ; ou bien, s'il l'a seulement entendu, de reconnaître sa voix parmi plusieurs. Dans l'hypothèse où le témoin a vu et entendu le suspect, se rappellera-t-il mieux la voix si on la lui présente seule,
ou si on l'associe d'emblée au visage ?
Deux psychologues anglais estiment que les points ont été peu et mal étudiés, malgré leur importance pratique. Aussi ont-ils mis sur pied une expérience. Ils ont demandé à 210 jeunes adultes d'écouter la voix de deux « suspects », un homme et une femme, puis de les identifier, une semaine plus tard. Mais les deux chercheurs ont réparti ces sujets en plusieurs groupes, soumis à des conditions différentes de test et de rappel : présentation de la voix seule, ou de la voix et d'une photo ; présentation de la voix et de l'information sur les suspects...
Le résultat le plus frappant est que la présentation de la photo du suspect détériore la performance d'identification de la voix chez tous les sujets. Les groupes qui n'ont pas vu de photo font nettement mieux que les autres. L'information sur le suspect, quant à elle, fait peu de différence.
Autrement dit, le mécanisme de reconnaissance visuelle est dominant, et il « brouille » le souvenir auditif.
La conclusion pratique à en tirer, semble-t-il, c'est que, si le témoin a vu et entendu l'agresseur, mieux vaut lui faire identifier la voix avant de lui montrer le suspect.
Références
Susan Cook et John Wilding, « Earwitness Testimony 2 : Voices, Faces and Contest », Applied Cognitive Psychology, décembre 1997.