Au début de l’année 2007, Joseph Morder entreprend de réaliser un film avec un téléphone portable. Cette commande du festival Pocket-film (il réunit des œuvres réalisées avec des mobiles) lui va comme un gant. Virtuose de la caméra super 8, auteur d’un journal filmé qui fait la part belle à l’autofiction, le cinéaste est parfaitement en phase tant avec cette nouvelle caméra mobile qu’avec l’esprit de ses utilisateurs privilégiés, ces créatures obnubilées par leurs flirts et leurs humeurs du jour : les adolescents. Il y a bien un côté fleur bleue chez ce cinquantenaire qui « aimerait partager le printemps avec quelqu’un » et décrit par le menu, complaisamment, les états d’âme qui l’assaillent dans cette attente. Il faut passer outre un agacement récurrent pour apprécier la tentative. J. Morder met à profit les possibilités comme les imperfections de son instrument pour tenir sa chronique et accomplir son dessein. Le mobile permet de se filmer l’un l’autre, et c’est comme cela que l’on fait connaissance du beau Sacha par exemple. Réajustant la luminosité à chaque recadrage, l’image du mobile est aussi changeante que les émotions, tantôt saturées de couleurs, tantôt fanées. Si la quête amoureuse du cinéaste envahit ses journées de printemps, d’autres histoires sont de la partie, comme la vente de l’appartement maternel ou l’élection présidentielle 2007. La chronique se fait tour à tour intime et politique et la caméra tient le journal des émois et des indignations.
Marc Olano