Faut-il ravaler la politique de Jean-Paul II en matière d'organisation de l'Eglise à un simple retour au passé, celui d'avant Vatican II ? Ce n'est pas l'avis du politologue Jacques Palard, qui estime que l'évolution actuelle de l'Eglise s'apparente à celle de tous les Etats, tiraillés entre le local et le global. Le Vatican joue, dit-il, la double carte du centre (romain), comme pôle d'impulsion et d'harmonisation, et de la périphérie (diocésaine), comme pôle de mobilisation et de contrôle des pratiques. Cette politique a infléchi les fonctionnements internes de l'Eglise catholique, notamment le rôle des évêques. Ce n'est d'ailleurs historiquement pas une nouveauté, car la fonction épiscopale varie au gré des conceptions théologiques dominantes ou des contraintes politiques. Le réaménagement en cours se manifeste de deux manières : d'abord la mise en place d'un contrôle plus étroit du Saint-Siège sur les évêques (notamment par la tenue de synodes généraux) et, en second lieu, par une réaffirmation de l'autorité individuelle des évêques dans leur juridiction. Ce net renforcement de l'autonomie des évêques s'effectue depuis une vingtaine d'années au détriment des mouvements nationaux de militants laïcs, mais aussi et surtout des conférences épiscopales nationales, dont le concile Vatican II avait singulièrement renforcé les prérogatives. Dès 1985, par exemple, le cardinal Ratzinger rappelait que les conférences épiscopales nationales ne sont que des instances administratives contingentes, alors que la fonction d'évêque est consubstancielle à la conception théologique de l'Eglise. Un débat long s'est déroulé à ce sujet, mais en 1998, la lettre apostolique de Jean-Paul II Apostolo suos a définitivement entériné ce point de vue.
Marc Olano