Arthur Danto, professeur émérite de philosophie à l'université Columbia et critique d'art, prolonge dans ce texte une réflexion entamée en 1996 avec Après la fin de l'art. Il y reprenait à son compte l'assertion de Hegel concernant la mort de l'art et tâchait d'en actualiser l'échéance. Il ne s'agissait pas d'annoncer la fin des productions artistiques, mais celle de l'idée même d'art.
L'objet de ce nouveau recueil est de brosser le tableau de l'époque artistique actuelle, où « tout est possible » et où il n'existe plus de critère permettant de dire ce qu'est une oeuvre d'art visuel. A. Danto relève en particulier que la démarche de rupture avec le passé, obligatoire pour l'artiste moderne, ne s'impose plus à l'artiste postmoderne : il peut jouer avec le passé et l'utiliser dans ses oeuvres.
Si la théorie exposée par l'auteur n'est pas d'une grande originalité, elle a cependant le mérite de revenir sur les deux grands récits interprétatifs qui ont accompagné l'histoire de l'art depuis la Renaissance : celui de Vasari, d'abord, instauré au xvie siècle, présentant l'art comme « la conquête progressive des apparences visuelles », et son progrès comme un progrès dans la représentation, et celui de Greenberg, « grand narrateur du modernisme » depuis son Essai de 1960 où il fait de l'abstraction l'horizon indépassable de l'art.
Le lecteur français, ignorant la place unique accordée à la pensée de Greenberg aux Etats-Unis, sera surpris par l'intérêt qui lui est ici accordé, ainsi que par une sorte de stratégie d'évitement des productions contemporaines non américaines. Il pourra donc être déçu par un recueil se réduisant souvent à un examen de la philosophie de Greenberg et finalement au constat aujourd'hui banal d'un modernisme dépassé. Mais ce constat est heureusement ponctué par quelques passages éclairants comme, par exemple, celui qui porte sur les propos de Gombrich comparant l'histoire de l'art à celle des sciences, ou encore le chapitre sur « les musées et les multitudes assoiffées ».