L'interprétation des gestes, science ou arnaque ?


Le corps a-t-il son propre langage ? Nos gestes ont-ils un sens ? Nos émotions sont-elles visibles ? Ces questions intéressent, et cela n’a rien d’étonnant : qui n’a jamais espéré percer à jour les motivations secrètes de ses interlocuteurs, débusquer les émotions qu’il tente de vous cacher ? C’est ce que proposent de nous apprendre différents ouvrages, qui remportent parfois un vif succès en librairie comme Ces gestes qui vous trahissent, de Joseph Messinger [1], et Le langage universel du corps, de Philippe Turchet [2]. Mais leur analyse du langage non verbal ne fait pas l’unanimité. Quel crédit accorder à ces ouvrages ?

Le dico des gestes

Ces gestes qui vous trahissent, qui a fêté ses quinze ans en 2008, a été réédité à cinq reprises. Dans cet ouvrage, Joseph Messinger classe les gestes par ordre alphabétique et en propose une interprétation. Ainsi, rire en se pinçant les narines trahirait un goût pour les blagues salaces. Se grattouiller fréquemment la commissure des lèvres avec une mine de dégoût révèlerait un tempérament jaloux. Quant à se palper le lobe de l’oreille droite, ce serait « la marque de fabrique de l’égoïsme patenté ». Pour Joseph Messinger, la parole et le corps sont deux modes de transmission de l’information qui « s’excluent souvent mutuellement et se contredisent presque toujours ». D’un côté, les mots simulent la vérité, aident le locuteur « à reconstruire le monde non pas tel qu’il est mais tel qu’il voudrait qu’il soit ». De l’autre, les gestes n’ont qu’un seul langage : celui des émotions et de la vérité. Savoir analyser les gestes permettrait par conséquent de savoir à qui l’on a affaire, et de s’adapter au mieux. Par exemple, si votre recruteur croise les mains et que le pouce gauche est au-dessus du droit, vous êtes face à une personne rationnelle et carrée à qui il faut parler de concret. Joseph Messinger recommande de gommer les tics gestuels dévalorisants, d’éviter certaines attitudes et d’en intégrer d’autres à son « vocabulaire » corporel. Mais il ne donne pas de précisions sur sa théorie, sa méthode, ni ses sources.