Des modules en pagaille
En 1983, au MIT, Jerry Fodor (1935- ) postule que la cognition humaine fonctionne grâce à des modules. Ils existeraient en nombre limité, et seraient spécialisés chacun dans une tâche. Il existerait, par exemple, un module du langage, d’autres pour le traitement de nos perceptions sensorielles, tout cela administré par un processeur central. En 1992, à Santa Barbara, l’anthropologue John Tooby (1952- ) et la psychologue Leda Cosmides (1957- ) radicalisent l’idée en estimant que nous sommes dotés peut-être de milliers de processus modulaires, mais sans administrateur central. Chacun est sous-tendu par des bases neurobiologiques, et a été sélectionné au fil de l’évolution. Et pas dans n’importe quel décor : dans celui de nos lointains ancêtres hominidés. Nous avons évolué tellement vite que nous vivons encore avec un cerveau taillé pour la vie dans une petite communauté au sein de la savane, à une époque où le sucre, notre carburant, représentait une denrée rare et précieuse. Nos comportements quotidiens sont donc en partie guidés par des processus automatiques dont nous n’avons pas conscience. Jusque dans l’environnement urbanisé et pour une part virtualisé du XXIe siècle, notre cerveau cherche en priorité à éviter des prédateurs, repérer le ou la partenaire susceptible de nous donner la progéniture dotée des meilleurs gènes, disposer des meilleures ressources à partager avec nos plus proches parents.
• Lance Workman, Will Reader. De Boeck, 2007.• Steven Pinker. (1994). Odile Jacob, 2013.