Le blues des salles de classe

Le malaise enseignant appartient à un autre temps. Il s’est transformé, à coups d’asphyxies administratives et de climat explosif, en un burn-out dans les salles de classe où, autrefois, l’enseignant régnait en maître.

Marion, enseignante contractuelle en CDD, recrutée via Pôle Emploi, témoigne de son effarement en arrivant dans ce qu’elle appelle « la fosse aux lions » après des années passées dans le privé : « J’ai été jetée sans aucune formation dans une classe de CE2 où j’ai cru tomber en enfer. Je n’aurais jamais imaginé ce qui pouvait se passer dans une classe avec des gamins de 8 ans ! C’est pire encore à la récré. J’avais peur chaque jour qu’un enfant n’en tue un autre. Les insultes, les crachats, les coups sont monnaie courante. Constatant que les cris ne servaient à rien, j’avais décidé de rester calme. Mais c’est nerveusement impossible. Au bout de 15 jours, j’étais en déprime. ».

Les feux du désamour

Il n’y a qu’à parcourir les centaines de témoignages de profs réunis dans l’ouvrage 1 co-écrit par José-Mario Horenstein, médecin psychiatre à la MGEN-Paris (Mutuelle générale de l’Éducation nationale) et Rémi Boyer, ancien enseignant devenu responsable de formations à distance et président d’une association dédiée aux secondes carrières des enseignants. La parole des profs y est sans appel.

Coralie, jeune professeur d’anglais, raconte ses débuts : « Dès la première heure de mon premier cours, je suis allée dans ma salle, j’ai tenu dix minutes montre en main tant c’était le foutoir, et tant je me sentais humiliée. » Sabrina, professeur de sciences économiques et sociales, a des années d’enseignement derrière elle : « Je pensais qu’avec l’expérience, enseigner serait plus facile mais cela fait 16 ans que je suis prof et c’est toujours aussi difficile, voire pire. », déplore-t-elle.