Le comportementalisme se fait thérapeutique 1958, Johannesburg

Avant tout, Mary Cover Jones

Après le petit Albert, le petit Peter. Souvenez-vous, le premier avait été conditionné par Watson en laboratoire pour éprouver une phobie. Le second, en 1924, connaît un sort plus enviable : Mary Cover Jones (1896-1987), ancienne étudiante de Watson, parvient à le déconditionner de sa peur des lapins. Pour ce faire, elle lui fait observer d’autres enfants absolument pas effrayés, ou le place face à un lapin en lui faisant déguster une glace. L’expérience sombre momentanément dans l’oubli, mais porte en germe les futures thérapies comportementales, dont la thérapie par inhibition réciproque ou la désensibilisation systématique préconisées à partir de 1958 par Joseph Wolpe (1915-1997).

Ce psychiatre de l’armée sud-africaine a constaté que la psychanalyse ne suffisait pas à supprimer les peurs réflexes chez les soldats traumatisés lors d’un conflit. Il a élaboré une procédure pour induire une inhibition réciproque, c’est-à-dire pour qu’une émotion positive supplante une anxiété survenant de manière automatique. L’angoisse peut être affrontée par paliers, en imagination ou in vivo (flooding), mais aussi concurrencée puis désagrégée par des étapes de relaxation progressive. Tout cela rend inutile l’analyse de l’histoire personnelle du patient, se concentrer sur les symptômes suffit. Les psychanalystes le pilonnent d’emblée : s’attaquer aux symptômes est de la ripolinade, un faux-semblant. Mais le succès est là.

• Jérôme Palazzolo. . Que sais-je ? PUF, 2016. • Albert Bandura. . De Boeck, 2007.