Le déclassement

Camille Peugny, Grasset, 2009, 173 p., 15,50 €
Aujourd’hui, chez les jeunes, la crainte de ne pas connaître la même réussite sociale que leurs parents est un sentiment largement partagé. Pourtant, il était jusqu’à présent peu étayé par les sociologues. Le livre de Camille Peugny, tiré d’une thèse, vient utilement proposer le diagnostic le plus complet à ce jour sur la question. Dans une société où le « mouvement global » reste positif, il met néanmoins en évidence la dégradation progressive des chances de mobilité ascendante entre les générations « dorées » nées entre 1945 et 1950, et celles nées au cours des années 1960. Dans l’intervalle, le risque de déclassement a augmenté pour toutes les catégories sociales. Les perspectives des enfants de classes populaires se sont même assombries entre 1980 et 2000. C. Peugny souligne par ailleurs que certains individus subissent un double déclassement : l’un scolaire, parce qu’ils sont diplômés mais ne trouvent pas de travail correspondant à leur niveau de qualification, l’autre générationnel, puisqu’ils ne peuvent reproduire ou améliorer la position de leurs parents.

 

À partir d’entretiens avec des enfants de cadres, le sociologue distingue deux expériences du déclassement. Chez ceux dont le père a été le premier à accéder à la position de cadre, c’est le sentiment d’appartenir à une génération sacrifiée et d’avoir été trompé par le système scolaire qui prime. Là où la lignée est solidement ancrée, le déclassement est vécu sur le mode de l’échec personnel, dû à une scolarité médiocre. La conscience est vive d’avoir déçu les attentes parentales, et conduit souvent à un désinvestissement de la sphère du travail.