Le mythe du caractère national. Méditations à rebrousse-poil

Julio Caro Baroja, Presses universitaires de Bordeaux, 2001, 102 p., 100 F.

Les Anglais sont flegmatiques, les Italiens volubiles et les Français versatiles : on ne se lasse jamais de discuter les caractères nationaux. Et pourtant, ce sont des mythes auxquels rien ni personne n'a jamais pu apporter le moindre brin de démonstration. Le problème des mythes est qu'ils ne se laissent pas non plus réfuter facilement. Dans ce petit opuscule traduit de l'espagnol, Julio Caro Baroja (mort en 1995), adopte, avant l'heure, la stratégie du contournement et de la déconstruction. Il lui suffit de juxtaposer les propos d'observateurs espagnols et étrangers tout aussi fiables les uns que les autres pour observer que, du xvie siècle au xixe, le « caractère espagnol » ne présente aucune sorte de consistance ni de continuité. Il passe sans coup férir de l'intelligence au fanatisme, de la finesse à la brutalité, de l'héroïsme à l'inaction.

L'auteur - par ailleurs grand ethnologue et folkloriste de l'Espagne contemporaine - non seulement épingle le bêtisier hispanophobe, mais dégage avec beaucoup de finesse les propriétés polémiques et historiquement datées de toute mobilisation des « caractères nationaux » : que l'intention soit positive ou négative, la notion est risquée, et l'histoire du xxe siècle a montré qu'elle pouvait être « menaçante et dangereuse », parce que directement liée à la montée des nationalismes populaires.

Reste l'usage, courant aujourd'hui, que font les ethnologues et toutes sortes d'analystes de la notion de culture : est-il plus innocent ? L'auteur n'aborde pas directement le sujet, mais ce petit traité sans prétention est, sans le dire, une excellente introduction à cette question de notre temps. Un seul problème à ce livre : les fautes d'impression.