Alain Roux, spécialiste de l’histoire chinoise, consacre les pages de ce gros volume à la biographie politique de celui qui fut l’un des grands tyrans du XXe siècle. Mao Zedong, (1893-1976), leader habile et chanceux, s’extrait de son origine paysanne pour accéder après bien des luttes et des aléas au poste suprême d’empereur communiste. L’ouvrage distingue cinq grandes périodes de la pensée « maozedong ». Dans les années 1920, ce rebelle nationaliste, xénophobe et populiste comprend combien la paysannerie est une force politique en Chine. La décennie suivante, il développe une stratégie de prise du pouvoir au sein du Parti communiste chinois, où la fin prévaut sur les moyens. Puis ses premières expériences de dirigeant local le conduisent à siniser le marxisme au moment où Staline professe que les lois de développement des sociétés humaines sont universelles. C’est pourtant dans le léninisme que Mao trouve les raisons d’exercer « un pouvoir absolu tel que nul tyran ou empereur n’en avait disposé avant lui », souligne l’auteur. Vainqueur de la guerre civile en 1949, le Grand Timonier veut forcer les portes du progrès : après avoir lancé la campagne des Cent Fleurs, qui limite la critique à celle des cadres du parti et réprime systématiquement toute mise en cause du régime, Mao lance le Grand Bond en avant qui doit permettre à la Chine de rattraper son retard. Cette marche forcée de tout un pays vers le collectivisme industriel connaît un échec cruel et rapide. Mao refuse de prendre acte de ses erreurs. Laissant le fiasco économique dégénérer en famine, il reste de marbre face à l’épouvantable désastre humain. Autre catastrophe, la révolution culturelle complète le bilan de l’œuvre et des idées de Mao : il est très largement négatif, conclut A. Roux.
Marc Olano