Le terrorisme à l'âge du live tweet Entretien avec Jean-Marie Charon

Quelques jours après l’attentat contre Charlie Hebdo, Jean-Marie Charon, spécialiste des transformations de la presse et du journalisme, revient sur le rôle et la responsabilité des médias dans notre société.

Les rassemblements du 11 janvier 2015 ont fait descendre des millions de Français dans la rue. Pourquoi se sent-on si solidaires derrière Charlie Hebdo, qui n’est pourtant pas un média central dans le champ journalistique ?

Sans doute faudrait-il plus de recul temporel pour répondre à cette question, mais plusieurs pistes se dessinent déjà : en premier lieu le sentiment largement partagé qu’en tuant des journalistes, en décimant une rédaction, c’est la liberté de l’information et quelque part la démocratie qui sont attaquées.

En second lieu, sans doute faut-il voir que le symbole est encore plus fort lorsque l’attaque vise un journal satirique et en même temps d’opinion, forme de presse davantage identifiée au long combat pour la liberté de la presse.

Enfin, plusieurs des journalistes-dessinateurs de presse qui ont été tués ont marqué plusieurs générations depuis la période soixante-huitarde. Leur production dépassait en effet largement Charlie : il étaient présents dans d’autres titres de presse, réalisaient des albums vendus en librairie et participaient à des émissions de télévision.

 

publicité

Une cinquantaine de chefs d’Etat se sont rassemblés à Paris pour défiler. Pourquoi cette union sacrée des politiques envers Charlie Hebdo ?

Devant le choc, la stupeur fige chacun dans l’instant. Les politiques s’engouffrent dans cet espace de silence pour donner un sens à cette sorte d’effroi collectif. Alors s’imposent comme thématique centrale les questions de liberté de la presse et de la démocratie. J’ai été personnellement plutôt frappé par la rapidité de la réaction, à la fois digne et silencieuse, d’une frange de la société sur les réseaux sociaux, qui partout appelait à des rassemblements quelques heures après le drame. Et ces rassemblements réunirent immédiatement des dizaines de milliers de personnes dans une ambiance d’unité et de calme, qui ne se démentira pas lors des rassemblements ultérieurs jusqu’au dimanche 11 janvier, à Paris, dans pratiquement toutes les villes et de nombreux villages.