Les aléas de la modernisation

La diffusion des préceptes managériaux serait-elle en train de gagner un ministère considéré jusqu'à présent comme l'archétype du modèle bureaucratique, à savoir l'imposante machine Education nationale ? C'est en tout cas la thèse de Françoise Lorcerie. Selon cette chercheuse au CNRS, la modernisation du respectable ministère est aujourd'hui manifeste et témoigne d'« une hybridation des fonctionnements réglementaires par des fonctionnements managériaux ».

Plusieurs exemples viennent étayer son constat. Tout d'abord, la ligne adoptée dans la loi d'orientation de 1989 : on y retrouve le principe d'efficacité - illustré par l'objectif des 80 % d'élèves à conduire au bac ; la notion de projet - mise en place par les établissements, de la maternelle au secondaire ; l'évaluation - assignée aux inspections générales. On pourrait ajouter aussi la notion de professionnalité des enseignants - apparue avec les IUFM - et celle d'information, en direction des familles. L'auteur souligne aussi le travail de la Direction de la programmation et du développement (DPD, ex-DEP) qui diffuse désormais chaque année de très complètes statistiques et évaluations (par exemple, niveau des acquis des élèves à l'entrée au CE2 et en sixième). La relance des zones d'éducation prioritaires va également dans ce sens. Les ZEP devront désormais se définir à partir d'un « contrat de réussite ». A la rentrée 1999, les partenariats (avec les entreprises, le milieu associatif, etc.) sur lesquels s'appuient les actions éducatives devront être argumentés et évalués en termes de progrès dans les apprentissages scolaires. La notion de contrat différencié implique que chaque établissement atteigne les objectifs qu'il s'est fixés. L'auteur souligne enfin la place désormais décisive de l'évaluation des projets, des équipes, des établissements éducatifs... Une idée qui a longtemps provoqué des réactions plus qu'épidermiques dans la corporation enseignante !