Les Mots, la mort, les sorts

Jeanne Favret-Saada, Gallimard, 1985.

1977. " On ne peut pas étudier la sorcellerie sans accepter d'être inclus dans les situations où elle se manifeste. " Tel est le troublant enseignement de cette étude de J. Favret-Saada, maintes fois citée depuis à l'appui d'une conception impliquée de l'ethnographie. Partie en 1969 à la recherche de croyances populaires dans le Bocage mayennais, J. Favret-Saada y séjournera deux ans. Elle y découvre une gestion du malheur à répétition à base d'envoûtements, d'emprises et de mauvais _il. Mais surtout, elle apprend (à ses dépens parfois) qu'on ne peut parler de ces choses-là sans en devenir l'acteur ou la victime. Car la sorcellerie n'a peut-être pas de cause observable, mais elle obéit à une loi de symétrie : on ne peut lutter contre le malheur qu'en désignant un auteur et en le faisant attaquer par un tiers. On ne peut y entrer sans risquer d'être " pris " soi-même. Une étude exemplaire pour l'ethnographie participante.