Les nouveaux historiens israéliens

L’histoire n’est jamais figée… Sur un sujet aussi sensible que le conflit israélo-palestinien, la recherche continue à évoluer, notamment en Israël, grâce à l’arrivée d’une nouvelle génération d’historiens.

« La nouvelle historiographie israélienne » constitue un courant universitaire critique plus qu’un groupe structuré. Apparue à la fin des années 1980, elle a remis en question la perception conventionnelle, jusqu’alors largement dominante de la naissance d’Israël, qui insistait sur l’innocence originelle du jeune État, faible et démuni. Ce dernier aurait remporté en 1948, presque par miracle, la victoire militaire face à la coalition des États arabes qui, décidés à entretenir le conflit, auraient durablement maintenu dans une situation de réfugiés les Arabes palestiniens qu’ils avaient incité à abandonner leurs foyers.

Benny Morris, Avi Shlaim, Ilan Pappé – pour nommer les trois nouveaux historiens les plus connus – ont remis en question cette vision quasi-officielle en utilisant des archives israéliennes et occidentales déclassifiées pour porter un regard neuf sur quatre questions principales : l’affrontement militaire entre Juifs et Arabes, l’exode des Palestiniens, les relations entre Israël et le royaume hashémite, les négociations israélo-arabes de 1949. Les recherches entreprises remettent largement en cause le savoir commun. Les conclusions essentielles se résument comme suit. À l’exception des mois de mai-juin 1948, la balance des forces militaires penchait en faveur d’Israël. Bien que le départ de 750 000 Palestiniens n’ait pas correspondu à un plan préconçu et systématique, il fut la conséquence directe de la guerre : attaques, crainte des combats, intimidation psychologique et, de plus en plus souvent au fur et à mesure que les combats se prolongeaient, expulsions menées manu militari par l’armée israélienne. Un accord tacite fut conclu entre les dirigeants sionistes et la Transjordanie du roi Abdallah afin de partager la Palestine mandataire et de n’entreprendre que des actions militaires limitées. Enfin, après la conclusion de l’armistice en 1949, les négociations échouèrent du fait de la position intransigeante d’Israël qui refusa toute concession sur les réfugiés palestiniens et les frontières.