Depuis au moins 40 000 ans, les humains ont représenté le monde qui les entoure en réalisant des peintures, des sculptures, des gravures… Parmi ces réalisations, celles de plans architecturaux, qui demandent une forte capacité d’abstraction et de perception de l’espace, sont plus rares et plus récentes. Les plus anciennes traces de plans à l’échelle retrouvées jusqu’ici remontaient à 3 000 ans, en Mésopotamie, et décrivaient des palais ou des objets de grande taille. Avant cette date, les représentations existantes semblaient peu précises, ne consistant qu’en une image schématique ou symbolique de l’objet ou de l’environnement.
Mais la découverte en Arabie saoudite et en Jordanie de pierres gravées vient remettre en question cette idée. Vieilles de 9 000 ans, ces gravures représentent des « cerfs-volants du désert » : des ensembles d’alignements de pierres et de murs, longs de plusieurs kilomètres, qu’on retrouve du Moyen-Orient à l’Asie centrale et qui servent de pièges pour rabattre des animaux. Ces représentations sont d’une très grande précision, ce qui pour les chercheurs indique que leurs créateurs sont soit les concepteurs des pièges soit ceux qui les utilisent, l’absence de vue aérienne rendant impossible à d’autres la maîtrise de ces ensembles complexes.
Cette maîtrise insoupçonnée de la représentation spatiale de l’environnement pourrait avoir servi aux humains du Néolithique à perfectionner leurs stratégies collectives de chasse, constituant une forme rudimentaire de communication par la gravure.
POUR EN SAVOIR PLUS
- Rémy Crassard et al., « The oldest plans to scale of humanmade mega-structures » PLOS ONE, vol. XVIII, n° 5, 17 mai 2023.