Maxime Doliveux, magistrat chargé de communication, présent sur Instagram et Linkedin. © DR
Sciences Humaines : En tant que magistrat chargé des questions de communication, vous vous adressez au grand public. Diriez-vous que les français et françaises connaissent bien leur justice ?
Lorsque l'on demande aux citoyens de distinguer les rôles du procureur ou du juge, ils ont souvent du mal à répondre. Un rapport du Sénat de 2021 montre que la moitié de la population estime mal connaître le fonctionnement du système judiciaire. L'institution a conscience d’utiliser des méthodes et un vocabulaire très spécifiques, ce qui n’arrange rien, même si pour nous les procédures et les mots sont importants.
La justice gagnerait à être mieux comprise et mieux connue, c'est un enjeu démocratique. D'abord, parce qu'elle est rendue au nom du peuple français – toutes les décisions commencent par cette phrase – et qu’il doit savoir ce qui est décidé en son nom.
Par ailleurs, nul n'est censé ignorer la loi. Or, cette injonction englobe aussi la jurisprudence, c'est-à-dire les décisions rendues en application de la loi qui créent elles aussi du droit. Par exemple, la Cour de cassation a retenu en janvier dernier l’obligation pour des enquêteurs d’obtenir l’accord du conducteur d’un véhicule avant de le fouiller, sauf s’ils agissent en flagrant délit. Pour connaître ces droits, il faut connaître cette décision de la justice.
À lire : Besoin d'un avocat ? Montez dans le bus !
Enfin, la confiance en l'institution est un enjeu essentiel. Quand on connaît peu ou mal quelque chose, on a tendance à ne pas lui faire confiance. L’école et les médias ont là un rôle d’éducation et d’information important à jouer.
SH : Développer la communication est l'un des objectifs de la loi récente pour la confiance des citoyens dans l’institution judiciaire, promulguée en 2021. Cela passe notamment par des images des salles d’audiences, qui avaient pourtant disparu de nos écrans…
Avant 1954, la captation des images dans les salles judiciaires était peu encadrée. À cette date, face aux débordements, la loi a interdit l’usage de caméras, micros ou appareils photos durant les audiences. Une loi de 1985 a rouvert un accès limité à la captation d’audience, pour la constitution d’archives historiques. La loi pour la confiance dans l’institution judiciaire, votée en 2021, a élargi les conditions. Les enregistrements sonores et audiovisuels sont à nouveau permis, sous réserve d’obtenir une autorisation du chef de la juridiction concernée. On trouve actuellement des reportages télévisés montrant des audiences captées en direct et décryptées, dans une optique pédagogique.