Les sciences cognitives, entre vie et société ?

Discipline récente, les sciences cognitives sont en pleine évolution. Depuis peu, elles s'ouvrent de plus en plus à tous les domaines de la vie, depuis l'affectivité jusqu'au monde de l'entreprise.

Le titre du colloque qui s'est tenu les 25, 26 et 27 novembre 1998 à Alfortville, « Entretiens de la cognition », sonnait comme celui d'une réunion intimiste et mystérieuse. Le décor exotique et surréaliste des pagodes chinoises où il prenait place augmentait encore l'impression d'entrer dans un autre univers. Cependant, le programme scientifique eut tôt fait de nous ramener sur terre, dans le monde parfois ardu et de très haut niveau de la recherche. L'ouverture de plus en plus grande des sciences cognitives à de nombreux domaines de la vie était manifeste : les thèmes de recherche se révélèrent très variés, des problèmes concrets posés par les techniques d'investigation furent soulevés, l'application des découvertes à la vie quotidienne ne fut pas oubliée, et l'importance d'une ouverture vers le monde industriel se fit pressante.

Dysfonctionnements de la cognition. Cet atelier était riche de nouveaux thèmes de recherche. Au-delà des troubles classiques comme la maladie de Parkinson et la maladie d'Alzheimer, ou les traumatismes cérébraux, d'autres troubles rencontrent l'intérêt croissant des cogniticiens : la dépression, la schizophrénie, l'anxiété, la maniaco-dépression. Les discussions passionnées de la table ronde ont montré l'intérêt de ces maladies pour aborder de nouveaux concepts dans les modèles cognitifs, comme les émotions ou la conscience de soi. Elles ont aussi montré le rôle majeur de ces questions dans le renouveau de la recherche en psychiatrie. La rencontre entre psychiatres et cogniticiens permet des échanges fructueux, ces derniers apportant une analyse rigoureuse des comportements humains, les premiers posant de nouvelles questions. Par exemple, la difficulté des patients schizophrènes à se concentrer ne peut-elle expliquer leur attitude de repli sur soi ? Ce symptôme devrait alors être compris comme une fonction adaptative, plutôt qu'un trouble. L'intérêt des sciences cognitives pour les maladies psychiatriques les humanise en les rapprochant des souffrances des individus.