Les systèmes éducatifs africains. Une analyse économique comparative

Alain Mingat et Bruno Suchaut, De Boeck université, 2000, 308 p., 210 F.

Une réflexion vient tout de suite à l'esprit en refermant cet ouvrage : lorsqu'on analyse les conditions de l'éducation en Afrique, on est sur une autre planète. Ici, pas de longs discours sur la méthode éducative à employer, sur le sens de l'apprentissage pour l'élève, ou sur les relations parents-enseignants. On ne parle ici, très pragmatiquement, que du rapport entre PIB et nombre d'enfants scolarisés, entre budget alloué à l'école et production de diplômés, du coût unitaire de l'enseignement, etc.

Chercheurs à l'Institut de recherche économique de l'éducation (Iredu), Alain Mingat et Bruno Suchaut proposent ici une analyse économique comparative, afin d'évaluer l'efficacité des politiques éducatives des pays africains.

Même si leur approche peut parfois paraître froide et factuelle, elle fournit des pistes de réflexions très intéressantes. La comparaison entre pays de même niveau de développement (moins de 2 000 dollars de PIB par habitant) montre la primauté de la gestion de systèmes éducatifs, sur les ressources allouées aux systèmes. Ainsi, les pays francophones d'Afrique de l'Ouest souffrent d'un net retard de scolarisation par rapport aux pays africains anglophones et aux pays d'Asie et Amérique du Sud. Pourtant, les ressources publi-ques mobilisées ne sont pas plus faibles.

Il apparaît des analyses des chercheurs qu'il existe peu de relations entre les ressources allouées et le nombre d'élèves que le système éducatif réussit à atteindre. Le problème réside en fait dans le coût de l'enseignement par élève : il est 1,38 fois plus élevé dans les pays du Sahel qu'en Asie ou Amérique du Sud. Et ce coût serait principalement dû au niveau très élevé des salaires des enseignants. Malheureusement, il n'y a aucun lien entre le coût unitaire de l'enseignement et le niveau moyen d'acquisition des élèves.

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A partir de toutes ces données, les auteurs indiquent des pistes d'action : instaurer un suivi régulier par les inspecteurs des maîtres et directeurs d'écoles, ne pas constituer de classes de trop petite taille, ne pas recruter d'enseignants dont la qualification va au-delà de ce qui est nécessaire... Pour oser un tel discours, pourtant sans doute réaliste, ne doit-on pas être sur une autre planète ?