Ces dernières années ont vu en France un regain d'intérêt, en littérature comme au cinéma, pour le passé colonial. On ne compte plus en effet les romans édités ou réédités, et les films dont l'intrigue se déroulent dans les anciennes colonies. A leur tour, les chercheurs ne dédaignent plus d'étudier une littérature coloniale longtemps tenue pour un genre mineur bien que largement diffusé.
Pourquoi ce retour au passé colonial ? C'est ce que des spécialistes issus de différents horizons - historiens, ethnologues, anthropologues mais aussi politologues, juristes... - ont cherché à examiner lors d'un colloque organisé en avril 1997 à l'initiative de l'association Mémoires méditerranéennes, du Centre des archives d'outre-mer et de l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (Iremam). La trentaine de contributions réunies dans le présent livre sont l'occasion de (re)découvrir des oeuvres françaises, mais aussi italiennes et anglaises, empruntées à la littérature enfantine ou populaire, et pour la plupart méconnues ou oubliées.
L'ensemble est accompagné d'illustrations, tirées de l'exposition qui s'était tenue en parallèle au colloque, qui en disent parfois plus long qu'un roman sur le regard des colons sur les populations indigènes... Quant à l'explication probable du regain d'intérêt auquel on assiste, elle est suggérée dès l'introduction par les deux initiateurs de l'ouvrage, Jean-Robert Henry et Lucienne Martini. « Aussi paradoxal que cela soit au moment où nous croyons vivre la mondialisation, la perspective européenne semble bien favoriser ce repli sur nous-mêmes et notre mémoire. » Et cette réhabilitation de la « geste coloniale, ajoutent-ils, ne serait pas infondée si elle n'accompagnait implicitement le retour à une vision inégalitaire du monde ».