Louis Crocq : Attentats du 13 novembre, peut-on parler de traumatisme collectif ?

Les attentats parisiens du 13 novembre ont marqué les esprits, frappé de plein fouet la communauté des Français. Peut-on parler de traumatisme collectif ? Réponses du professeur Louis Crocq, médecin général, psychiatre des armées, créateur du réseau national des cellules d’urgences médico-psychologiques au lendemain des attentats de la station Saint-Michel en 1995, et auteur de Les traumatismes psychiques de guerre, 16 leçons sur le trauma et Les paniques collectives (Odile Jacob).

Chacun de nous est touché, bouleversé par les événements dramatiques qui se sont tenus à Paris et à Saint-Denis le 13 novembre. Certaines images diffusées par les médias nous reviennent en tête inlassablement, tandis que notre état de vigilance vis-à-vis de la menace s’est accru. Pour autant, peut-on parler de traumatisme collectif ?

Non. D’un point de vue purement terminologique, il s’agit d’un abus de langage. Le traumatisme découle de la confrontation directe avec le réel de la mort. Peuvent être traumatisées les personnes qui ont été en contact avec la scène, le jour J : les survivants, les témoins, les secouristes, les forces de l’ordre, etc. Ceux-ci ont vu les corps inanimés, le sang, la douleur. Ils ont connu la surprise, l’effroi, l’horreur, le sentiment d’impuissance. Cette scène a fait effraction dans leur équilibre psychique et a bouleversé leurs capacités. Certains étaient désorientés dans le temps et l’espace, au point d’éprouver des difficultés à s’identifier eux-mêmes, à penser. Il en est de même par exemple pour ceux qui ont vu des employés du World Trade Center sauter des étages élevés des tours jumelles le 11 septembre 2001 et s’écraser au sol.