Mahomet ou Mohamed ?

Monsieur Yousri Aissaoui nous a dans un message récent reproché d’avoir commis ce qu’il jugeait être deux erreurs dans l’article d’Olivier Hanne intitulé « Qui était Mahomet ? » (Les Grands Dossiers Histoire, n° 4, décembre 2015) : celle d’avoir mal nommé le Prophète, et d’avoir mentionné qu’à une certaine période de sa vie, il a pu rendre un culte à une divinité « non unique ». D’autres lecteurs ayant peut-être fait le même diagnostic que lui, je déroge à la règle en répondant un peu longuement à son message, qui était très court.

Mahomet est effectivement une transcription approximative (les voyelles sont inversées et la consonne finale un peu déformée) de l’arabe Muhammad ou Mohamed. Elle apparaît en latin (Mahometus) et en français (Mahomet) au 13e siècle, et depuis a continué à être utilisée en francophonie pour désigner le prophète de l’islam. Aujourd’hui, on pourrait peut-être, par souci d’exactitude, revenir à l’original, mais cette dénomination a aussi l’avantage de distinguer le Prophète de l’ensemble des personnes qui s’appellent Mohamed. C’est sans doute pour cela qu’Olivier Hanne l’a conservée, et non par erreur. Les religions circulent à travers les langues, et les noms de leurs personnages principaux se transforment très souvent : ainsi le Cébrail de la Bible hébraïque devient Gabriel ou Gavril chez les chrétiens et Djibril chez les musulmans arabophones. En Afrique de l’Ouest, Mohamed est parfois appelé Mamadou. Est-ce une déformation regrettable ou bien une façon de se sentir d’autant plus proche de sa religion qu’on peut la dire dans la langue de sa communauté de vie ? Si certains trouvent que l’appellation Mahomet est erronée, il n’y a en tout cas pas d’offense à la pratiquer.