Institut du développement social (IDS) de HauteNormandie. Manuel Boucher, sociologue associé au Cadis-EHESS et directeur scientifique du Laboratoire d’étude et de recherche sociales, nous reçoit dans son bureau, au milieu des livres et des notes accumulées au gré des recherches. Il reconnaît qu’il a oublié le rendez-vous, mais qu’à cela ne tienne ! Il a du temps à nous consacrer, autour d’un café.
Ancien éducateur spécialisé, fervent militant antiraciste, M. Boucher s’intéresse aux désordres urbains depuis les années 1990. À cette époque, le chômage se développe, le sentiment d’insécurité s’accroît et l’opinion devient sensible aux propos du Front national. Les pouvoirs publics s’engagent dans des politiques sécuritaires. Le sociologue est révolté. Petit-fils d’ouvriers, il a grandi dans un grand ensemble des Hauts-de-Rouen, dans une famille acquise aux méthodes pédagogiques Freinet et à l’éducation populaire. « Ces actes de violence me semblent exprimer une révolte, un état de souffrance et un malaise social », explique celui qui refuse de porter le costume-cravate pour ne pas créer de distance avec le terrain. Du rap à l’État social en passant par la police, le sociologue mène pléthore d’enquêtes sur les « turbulences » des jeunes de cité et les acteurs publics qui les encadrent. Les conclusions figurent dans pas moins de vingt ouvrages, parus entre autres dans la collection « Recherche et transformation sociale » qu’il dirige aux éditions L’Harmattan. Un choix entièrement assumé : selon lui, c’est une façon de s’exprimer librement, en s’affranchissant des contraintes éditoriales.