Marie-Claude François-Laugier : Sommes-nous tous névrosés par l'argent ?

Récession, surendettement, prévisions économiques anxiogènes : l’argent, star médiatique de nos années de crise, se trouve plus que jamais au cœur de nos préoccupations. L’occasion de faire le point sur la place qu’il tient réellement dans nos vies, avec une spécialiste de la finance devenue psychanalyste.

 

Psychologue clinicienne et psychanalyste, Marie-Claude François-Laugier a exercé dans la banque et la haute finance pendant de nombreuses années avant de réaliser, à 57 ans, il y a 13 ans, son rêve d’enfant : devenir psy. Elle est l’auteure de Comment régler ses comptes avec l’argent (Payot, 2004) et de L’argent dans le couple et la famille (Petite bibliothèque Payot, 2007).

 

Comment passe-t-on de la finance à la psychanalyse ? Auriez-vous été déprimée par l’argent ?

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J’ai travaillé trente ans dans la finance, et cette expérience m’a amenée à conclure qu’il n’y a jamais de rapport neutre à l’argent. Les rapports avec lui sont même souvent plutôt passionnels ! Par ailleurs, j’ai toujours voulu être psychiatre ou psychanalyste, et je n’ai pas pu le faire jeune parce qu’il a fallu que je commence à travailler très tôt. A 52 ans, j’ai décidé d’être psy. Comme j’avais fait deux psychanalyses, je me suis engagée dans un master 2 à Jussieu sans trop y croire au début, et je suis allée jusqu’au bout. J’ai eu mon diplôme à 57 ans et j’exerce depuis 13 ans avec passion. Je me suis mise parallèlement à écrire sur l’argent, car j’ai constaté qu’il n’existait pas ou très peu d’ouvrages sur la psychologie de l’argent alors que je trouve essentiel de décrypter et décrisper nos rapports avec lui.

 

Sommes-nous tous des névrosés de l’argent ?

On a tous une légère névrose avec l’argent, tout simplement parce qu’on a tous peur du manque ! Sans argent, impossible de vivre dans nos sociétés. On est obligé de faire avec, et nos parents, qui étaient dans le même cas, nous ont un peu imprimé leur rapport à l’argent, que l’on ait, plus tard, adhéré à leur modèle ou pris le contre-pied. Pour n’être vraiment plus névrosé de l’argent, c’est-à-dire ne plus être heureux ou malheureux de notre rapport avec lui, il faut avoir réfléchi à la valeur qu’il représente pour nous, à la place que nous lui accordons et avoir répondu à ces interrogations, soit qu’on ait l’impression de toujours manquer d’argent alors que nos besoins essentiels sont couverts, soit qu’on en manque vraiment, ce qui est le cas de beaucoup de gens en ces temps de crise, soit qu’on en ait accumulé beaucoup mais qu’on n’en n’ait jamais assez et que l’on en veuille à l’infini, ce qui est impossible puisqu’on ne peut pas atteindre l’infini !

 

Quand notre rapport à l’argent devient-il pathologique ?