Légitime pendant aux études sur les femmes, la « masculinologie » s’est développée à grande vitesse depuis plus de dix ans dans le monde anglo-saxon. Pas si neuve, donc, elle nous parvient aujourd’hui tout équipée des outils de la critique, de la théorie du genre et des études queer. Si deux revues, l’une de géographie, l’autre de socioanthropologie, se trouvent presque en même temps à traiter le sujet, n’allez pas donc croire au retour d’un « éternel masculin ». « Masculinité » s’écrit désormais au pluriel. En ouverture de Géographie et cultures, Charlotte Prieur et Louis Dupont s’en expliquent. À côté de la masculinité hégémonique, normative et patriarcale, il en existe quantité d’autres alternatives : homosexuelle, trans, queer et même féminine. Et comme – géographie oblige – ces masculinités s’expriment dans des lieux, leur dossier nous emmène sur les traces des topographes, visite les dragueurs du bois de Vincennes, traite du sexe en prison qui se révèle très « conservateur », interroge une drag-queen canadienne, et surtout donne un large panorama des recherches en « géographie des sexes, genres et sexualités ». Sautons la Méditerranée, et même au-delà : les Cahiers d’études africaines ont affaire à un contexte bien différent, où les rôles et les orientations sexuelles, pense-t-on, ne sont pas si libérés que cela. Le temps n’est pas loin où le modèle de l’homme viril était celui du guerrier dominateur et sûr de lui. Pourtant, écrivent Christophe Broqua et Anne Doquet, « les identités de genre (en Afrique) ne sauraient se réduire au modèle binaire masculin/féminin : des représentations oscillant entre catégories apparentées au féminin et figures masculines inachevées caractérisent certains hommes, considérés comme n’en étant pas tout à fait ».