Internet rend-il bête ? Tel est le titre de la traduction française (Robert Laffont, 2011) de The Shallows (les superficiels), ouvrage de l’écrivain américain Nicholas Carr. Celui-ci accuse le Web de nous rendre perpétuellement papillonnants, et rétifs à tout effort intellectuel. Quels sont ses arguments ?
Vous citez les travaux de psychologues montrant que surfer sur la Toile surcharge la mémoire de travail, et nous empêche de lire ou raisonner en profondeur. Par quels mécanismes ?
Une mémoire de travail surchargée compromet non seulement l’attention, mais aussi, comme l’a souligné Torkel Klingberg (1), rend les distractions encore plus redoutables. Ce qui entrave par ailleurs notre capacité à consolider des souvenirs en mémoire à long terme, processus qui semble requérir une grande attention, et à relier en savoir conceptuel des informations éparses mais essentielles. Il est démontré qu’une mémoire de travail saturée réduit l’apprentissage et la compréhension. Même les petites distractions créées par des hyperliens alourdissent notre charge cognitive au point, semble-t-il, de réduire notre compréhension d’un texte écrit.